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Des actes notariés témoins de l'histoire

Sommaire de l'exposition

Une promesse de mariage très insolite 06 janvier 1664
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Présentation du contenu :

 

Ce 6 juin 1664, deux personnes se présentent devant le notaire royal de Sens maître Denis Hubert afin d’y établir un acte pour le moins singulier. Il y a là François Daniel, Sieur de la Rozée, qui se dit cavalier dans la compagnie de Monsieur de Coulanges en garnison à Sens. L’homme est natif de Brive-la-Gaillarde. Et Marie Chaudery, veuve de Marin Ygot, marchand hôtelier à Sens, au Clos-le-Roy. Ceux-ci désirent se marier, pour l’amour et affection réciproques qu’ils se portent, mais François Daniel, nouvellement enrôlé par le Sieur de Coulanges doit tout d’abord accomplir son devoir militaire et suivre son capitaine pour le service auquel il s’est engagé. L’histoire d’amour entre ces deux êtres, née probablement dans l’auberge du Clos-le-Roy, pourra-t-elle résister à la durée de la campagne du Sieur de la Rozée ? C’est justement au sujet du temps de service que le contrat prend tout son intérêt, en dehors du fait social, lui aussi plutôt inhabituel. L’enjeu est ainsi posé : François et Marie promettent de s’épouser en toute loyauté mais seulement après le retour du cavalier. Ils s‘accordent même un délai de réponse d’un mois après ce retour fixé à la Saint Jean-Baptiste. Durant tout ce temps, ils ne pourront s’engager ailleurs, mais si le temps est révolu sans d’autre promesse de convoler, chacun pourra reprendre sa liberté et aller se marier avec qui bon lui semblera.

Un véritable contrat de mariage concrétiserait la démarche des deux promis. L’acte en soi n’en est pas véritablement un, puisqu’il ne situe pas l’engagement au niveau des biens. Cette promesse insolite possède donc une valeur juridique discutable, d’autant plus discutable que le statut d’aventurier de François Daniel semble se profiler au regard de la bonne fortune de la veuve de l’aubergiste.

Un véritable contrat fondé sur le droit coutumier de la coutume de Sens donnerait du sens à cette promesse mutuelle.

 

Furent présens en leurs personnes François Daniel, Sieur de la Rozée à présent cavallier dans la compagnie de Monsieur de Coullanges estant de présent en garnison en ceste ville de Sens, luy natif de Brifve la Gaillarde, pays du bas Lymousin, pour luy d’une part, et Marie Chaudery, veufve de deffunct Marin Ygot vivant marchand hostelier audit Sens, demeurant au Cloz le Roy, pour elle d’autre part, lesquelles partyes pour l’amour et affection réciproque qu’ils ont dict se porter l’un à l’aultre, et affin que l’un d’eux puisse assurer l’aultre ont vontairement recognus et confessé avoir faict et accordé entre elles ce qui ensuit, c’est asscavoir que ledit François Daniel et ladite Marie Chaudery ont promis et promettent par ces présentes de se prendre et avoir l’un l’aultre par foy et loyaulté de mariage et faire passer tel contrat en présence de leurs parentz qu’il sera nécessaire aux clauses et conditions qui seront jugées et acordées lors raisonnables, et ce dans ce jour et feste de Saint Jean Baptiste prochain, à la charge que lesdictes partyes ne se pourront engager ny pourveoir par mariage qu’après ledit temps passé, et d’aultant que ledit Daniel va incontinent partir pour aller au service de sa majesté duquel il espère de revenir dans ledit temps.

 

Il sera tenu en quittant ladite compagnie de rapporter un bon et vallable certifficat de ses services dudit Sieur de Coullange son capitaine, ou telle autre personne qu’il sera nécessaire et pour la facillité et entier accomplissement desdites promesses de mariage sont, icelles partyes, demeurées d’accord qu’elles attendroient la responce l’un de l’aultre encores un mois après ledit jour de Saint Jean-Baptiste prochain, après lequel mois expiré lesdites partyes pourront se pourvoir et marier à qui bon leur semblera sans aulcuns despens, dommages ny intérestz prétendre l’un allencontre de l’aultre, car ainsy, sy comme, promettant, obligeant, renonceant, faict et passé audit Sens en l’estude du notaire le sixiesme jour de janvier mil six cent soixante et quatre en présences de Jean Bonnet, clerc à Sens et Jacques Gardois, vigneron audit Sens, lequel et les partyes ont desclaré ne scavoir signer, de ce interpellez.

 

Document présenté par l'ensemble des étudiants en 1ère année de BTS Notariat (année 2016-2017). 

Arch.dép. Yonne, 3 E 71/93